Source: Le Monde. L’artiste congolais Freddy Tsimba est l’hôte de la première exposition d’art contemporain organisée par l’AfricaMuseum de Bruxelles. A Bruxelles, le Musée royal de l’Afrique centrale, rebaptisé en
PORTEUSE DE VIES
Pour célébrer d’une autre manière le 70e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme (10 décembre 2018), une sculpture de l’artiste congolais Freddy Tsimba, Porteuse de vies, commande du Fonds de dotation le Manège de Chaillot, a été offerte au Théâtre National de la Danse, enrichissant ses décors pour la première fois depuis 1937.
Porteuse de vies est debout, elle partage, elle offre sa contribution, elle porte le savoir comme elle porte la vie. Elle marche fièrement, elle nous offre les clefs pour qu’aujourd’hui l’être humain triomphe, pour clamer haut et fort que la vie n’a pas de prix. 220 kilos de douilles de cartouches récupérées dans les zones de guerre en République démocratique du Congo. Un socle en ancien portail de prison. 4,25 m c’est la grandeur de cette femme. Cette femme marche ; elle tient dans ses bras un livre fait de clefs récoltées dans les marchés et rues de Kinshasa.
Pourquoi avoir réalisé une œuvre avec des douilles ?
Freddy Tsimba : « Des milliers de douilles c’est des milliers de vies. Récupérer ces douilles de cartouche c’est rendre hommage aux victimes tombées sous ces balles. En premier lieu c’était l’idée de la mobilité. S’il y a bien un élément qui est libre, c’est la douille car on la trouve partout ; elle bouge, elle peut aller n’importe où, alors que nous, individus, ne sommes pas libres de nos mouvements. L’élément douille a été créé pour ôter la vie. Les clefs peuvent être le symbole de l’enfermement, de la privation de liberté. Ici elles sont : ouverture, connaissance et donc liberté. Un livre en clefs nous ouvre des portes : celle du voyage, celle du savoir et celle du partage. »
Pourquoi une femme plutôt qu’un homme ?
Freddy Tsimba : « C’est encore une fois une façon de rendre hommage : on dit « déclaration des droits de l’homme » et pourquoi pas « des droits de la femme » ? Dans mon pays, l’exclamation la plus récurrente dans les émotions du quotidien n’est autre que « mama na ngai » qui invoque la mère donc la femme. Et cette femme c’est aussi elle qui paye cruellement les frais en période de conflits… »